Anderlecht : émeute urbaine, cécité collective…

"Les Noirs américains n’ont pas de patrie. Ils sont en Amérique chez eux et aliénés, comme les autres Américains, mais eux savent qu’ils le sont." (Debord).

Nous nous sommes remis à lire le Soir, vous savez cet infame canard, cet hégémonique torchon de notre Belgique toujours grande et belle, qui vous tombe des mains tellement il est mal écrit. Nous avons rechuté il y a peu, à la faveur des violences urbaines se déroulant ce vendredi soir à Anderlecht... A notre grand désarroi, mais sans réel étonnement, nous avons pu constater qu’aucune amélioration notable n’y est perceptible… Ainsi, un imbécile du nom de Guy Verstraeten, qui y officie comme pigiste, feint de s’étonner de l’ampleur du racisme qui règne dans notre si belle contrée ; racisme qui est essentiellement structurel, ce dont le dit imbécile n’a aucune idée. L’amusant, car le réel aime l'ironie, c’est que notre journaliste benêt, dans son semblant d’article, pensant le combattre, l’illustre de la meilleure manière qui soit, car comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, Monsieur Verstraeten pratique ce racisme intuitivement et avec quel talent…Ainsi notre ethnologue à la petite semaine, façon Henri Valois, qui sévit dans le quotidien vespéral - ethnologie dont Lévi-Strauss lui-même disait qu’elle était la petite fille du colonialisme… - sait reconnaître à coup sur, à partir du faciès (ah la biométrie !), l’origine de jeunes émeutiers anderlechtois… Quelle science ! Vous connaissiez les statistiques ethniques, voici la reconnaissance ethnique automatique du Professeur Verstraeten… Tandis que des hooligans du Sporting d’Anderlecht, eux, sont sans origine, la leur en tout cas n’a ni valeur d’explication, n'est ni preuve à charge, le « mauve et blanc » et la bière suffisent… Ainsi va la raison passée à l'eau de Javel ! Mais que l’on ne se trompe pas, Monsieur Verstraeten n’est pas tout seul, le racisme systémique c’est un racisme dans l’air du temps, qui prend sa source dans le passé en l'actualisant dans le présent le plus brûlant, il est dans toutes les têtes, y compris celles des victimes, et c’est précisément ce qui le rend invisible… Le racisme en Belgique, et tout particulièrement à Bruxelles, n’est pas simplement le fait de quelques supporters éméchés, ce serait trop facile et si utile, il touche la société belge dans sa totalité et dans toute sa profondeur, il l’organise, la façonne, l'oriente, la structure (sous-citoyenneté, sous-logement, sous-emploi, sous-scolarité, état d'exception dont bénéficient certaines populations et certaines croyances…). Ces événements ne sont qu'un lapsus de plus qui en révèle l'ordre caché. Qui n’a de cesse d’employer le terme de «nouveaux belges», « belges de papier » ? Qui parle à tout bout de champ d'« allochtones » ? Qui parle de « reconquête des quartiers » du centre ville ? Qui fait l’impasse sur la répétition, pour le moins suspecte, de meurtres racistes en Belgique ? A qui la faute si en RBC l’on a les taux de chômage les plus hauts de Belgique, alors qu'elle est la région la plus prospère du pays ? Qui attribue à une certaine « jeunesse » violence et dangerosité intrinsèque ? Qui en fait le bouc émissaire emblématique de tous les maux urbains ? Qui insiste, à coup de statistiques plus que douteuses, sur la démographie galopante des musulmans à Bruxelles? Qui fait de la présence d’enfants d’immigrés dans une école le marqueur de dégradation du niveau scolaire ? Sont-ce les supporters enragés d’Anderlecht, sont-ce de pauvres skinheads demeurés (juste bons à agresser des femmes et des enfants), vraiment ?

2 commentaires:

Anonyme a dit…

bon article.
malheureusement nous vivons dans un pays qui a du mal à sortir du carcan colonial passé
où l'homme de couleur avait l'habitude d'être exclu de la vie économique et social.

Guillermo a dit…

Quel violence!, dirait Claudy Focant, dans Dikkenek. Cela vous prouve,cher monsieur,quelles sont les références culturelles qui alimentent mes réflexions. En fait, qui êtes-vous exactement pour tenir des propos aussi durs sur quelqu'un dont vous ne connaissez rien. Enfin rien... Vous savez que j'officie comme pigiste au Soir, c'est que je ne vous suis pas si inconnu que cela. Pour ce qui est du fond (la forme laisse à penser que vous êtes un intellectuel en souffrance, mais j'arrête là la psychologie de comptoir), j'ai essayé, au travers des deux ou trois articles que j'ai écrit sur la question des violences urbaines à Anderlecht, de faire passer un message qui me semblait être le plus nuancé possible dans l'espace qui m'était imparti. Dès le départ, j'ai parlé du racisme des hooligans présents, mais dès que j'ai pu, j'ai souligné que nombre d'habitants de la place de Linde encourageaient ces hooligans, notamment dans le papier que j'ai consacré, le lundi, aux émeutiers des deux camps. Oui, il y a un racisme que je sens de plus en plus profond autour de moi et j'ai essayé, peut-être naïvement,de le dénoncer en soulignant que les autorités publiques avaient tout intérêt à se pencher sur le fossé qui séparait les deux groupes en présence. Ma fiancée est d'origine africaine et elle a des difficultés à trouver un appartement à cause de la couleur de sa peau ( tiens, tout d'un coup, une sorte de rage me donne envie, moi aussi, de vous insulter. mais je me contiens)
Quant à la reconnaissance ethnique immédiate, sur un simple coup d'oeil: à moins d'avoir vécu toute sa vie à la campagne ( personnellement, je vis à 2 minutes de Saint-Guidon depuis près de 15 ans), de ne pas avoir côtoyé de jeunes d'origine marocaine dans son parcours ( à peu près 70% de mes amies et amies), difficile de passer à côté du fait que la plupart des jeunes casseurs de vendredi dernier étaient d'origine immigrée, plus précisément nord-africaine. Un sentiment conforté par toutes les données récoltées auprès des éducateurs de rue et des agents de prévention. Désolé de ne pas avoir pu pousser plus en avant mon analyse, mais la place qui est impartie aux journalistes dans un quotidien n'est pas toujours celle qu'ils souhaiteraient avoir. Je connais la théorie du retournement du stigmate et parler de jeunes d'origine immigrée ne m'a sembloé utile, dans ce contexte, que pour marquer la différence entre les "blancs" d'un côté et les "colorés" de l'autre, différence qui prenait toute son importance quand on entendait les "bougnoules enculés" des supporters d'Anderlecht. Si vous ne l'avez pas perçu dans mon article, écrit à la hâte entre 21h15 et 21H45 ( je me défends pour le style et pour le sentiment d'immédiateté), tant pis.
Vous connaissez mon nom, j'aimerais maintenant connaître le vôtre. Vous êtes si prompt à lancer les insultes les plus dures et les jugements les plus définitifs que vous devez probablement pouvoir en discuter à visage découvert.
Sur ce, refaite un tour dans le traitement que les autres médias ont fait de l'événement, juste pour voir si l'élément raciste de ces violence a été aussi largement évoqué par quelqu'un d'autre. On est toujours l'imbécile de quelqu'un, mais en lisant l'aigreur et l'agressivité de vos propos (conjugués avec un certain sens de la formule et de la référence), je ne suis pas si mécontent d'être le vôtre.
Guy Verstraeten